Deux mois pour traverser la France par les fleuves et les canaux. Excepté un long arrêt forcé de 12 jours à Arles, pour cause de panne de moteur, il nous fallait bien cela pour franchir : 173 écluses réparties sur 1 387 kms.
La planification de nos journées de navigation ne se compte plus en miles ou en kms… mais en nombre d’écluses !
Notre parcours : le Rhône, la Saône, le Canal Marne-Bourgogne, le Canal latéral à la Marne, la Marne et la Seine.
Départ de Port Saint-Louis du Rhône où il ne s’agit pas de bâcler la séance de transformation d’Emilie en péniche. Là-bas il est facile de trouver du bois, fin septembre, quelques voiliers arrivaient du nord de l’Europe et ne demandaient pas mieux que de se débarrasser de ces encombrants supports pour naviguer en mer. Nico s’attèle vite à les adapter à notre mât et à l’enrouleur. Ces derniers sont couchés sur le pont, à l’aide d’une grue. Au chantier Naviservice, en ½ heure, c’est bouclé ! Puis, tout l’équipement arrière, susceptible d’être exposé dans les écluses, est démonté : régulateur d’allure, hydro-générateur, moteur d’annexe, etc. trouveront leur place à l’intérieur du bateau ! On a également suivi les conseils d’un équipage hollandais très sympa et qui nous a largement fourni en bois : Nicolas a fabriqué une petite pancarte indiquant aux péniches que l’on croise notre tirant d’eau (profondeur de la quille)… et justifiant que l’on ne puisse pas longer les berges de trop près. Dernière précaution à prendre pour être fin prêt :
multiplier les pare-battages. Nous nous équipons alors de rondes et volumineuses bouées (type bateau de pêche). Placées à l’avant et à l’arrière, où la coque est courbée, ils permettent de protéger efficacement la pointe et le mât qui dépasse largement des 2 côtés du bateau. Des planches de bois placées en longueur sur les pare-battages classiques permettent de les maintenir bien à l’horizontal et évitent de les bousiller dès les 1ères écluse maousses costauds du Rhône. L’utilisation de pneus en caoutchouc est proscrite par les Voies Navigables de France (V.N.F.) (une fois à l’eau, risque d’endommagement des hélices).
Après quelques jours d’intense boulot, c’était chouette de retrouver Xavier et Charlotte, accompa
gnés de Timothée et Julie. On est allés voir de près l’état de la Méditerranée un jour de Mistral :
ça ne rigole pas trop en mer et on tient à peine debout à terre !
Sympa également de rencontrer Jean-Luc et Brigitte qui possèdent aussi un Dufour 4 800 et ont le même type de projet que nous autour de l’Atlantique… et c’est pour bientôt les veinards !
Une fois le Mistral e
nvolé,
Emilie doit faire des adieux définitifs à la mer et apprendre à goûter les joies de l’eau douce. Une écluse et une journée de navigation plus tard, nous sommes à Arles. Nous sommes à l’affût de la moindre fausse note musicale de notre moteur. Il démarre au ¼ de tour et « ronronne » normalement. Nous constatons juste une petite fuite d’eau dont Nicolas souhaite vérifier l’origine, arrivés à Arles. Le collecteur des gaz d’échappement ne supporte pas trop le démontage et son tube d’admission semble très oxydé par l’eau de mer (circuit à refroidissement direct). Après un devis et quelques jours de réflexion, nous ac
ceptons son remplacement et en profitons pour redonner un petit coup de jeune à notre bon vie
ux Perkins 4108. La facture n’est pas très douce mais notre moteur n’a par la suite plus donné aucun signe de faiblesse, et ce malgré des températures très basses et humides, à la fin de notre périple… et le voici reparti très dynamisé !
Séjour
de 12 jours à Arles, y a pire… On en a profité pour prendre
un bus direction Saintes-Maries de la Mer… l’appel de la mer… Hors saison, cette petite station balnéaire est très agréable. Petite promenade à pied dans les étangs :
Nico s’est pris d’amitié pour les flamands roses et les a photographiés sous toutes leurs coutures. Se sentant un peu délaissée, Séverine a dû sortir ses talents d’imitateur animalier, pour faire le flamand rose et attirer l’œil du photographe… une vraie réussite !
Sév, l'apprentie flamand rose !
Je profite encore un peu de l'eau sâlée... et même un 11 octobre !
Nous avons bien aimé
Arles, dont le nom est aujourd’hui indissociable de celui de Vincent Van Gogh, venu y chercher la lumière…
mais où ses œuvres n’ont jamais été reconnues de son temps.
Des pêcheurs de silures, belles bêtes !
Arles, la provençale, au très appétissant marché coloré et aux jolies boutiques ensoleillées…
Arles… et ses souris ! En effet, Emilie a accueilli ces petits rongeurs… que l’on s’est empressé d’attraper dans de petites cages, bien approvisionnées en fromage. Amis des bêtes, nous nous contentions de les remettre sur le quai, mais ces filous sont remontées à bord et ne se sont pas fait prendre 2 fois par notre piège… Sév a donc dû stocker toute la nourriture dans de grandes boîtes en plastique, les laissant si affamées qu’elles se sont attaquées au couvercle de nos topper-wares ! Les goulues ! Finalement, un appareil à ultra-sons a eu raison de nos passagers clandestins, qui ont enfin consenti à quitter le navire, après plusieurs semaines de squatt… non mais !
Enfin en route pour
Avignon, nous avons apprécié notre journée au Palais des Papes puis dans une cave pour déguster des vins des Côtes du Rhône !
Le fameux pont d'Avignon
... et les fameuses Côtes du Rhône Souhaitant éviter les grosses crues d’automne sur le Rhône,
nous avons ensuite enchaîné de longues journées non stop, du levé à la tombée de la nuit. Pour notre confort, rien de mieux que la mise en place d’un hamac vénézuélien pour nous asseoir agréablement… et barrer avec les pieds !
Les écluses gérées par la Compagnie Nationale du Rhône sont très impressionnantes et parfois un peu sportives pour un petit voilier comme le nôtre. Il est plus confortable de voyager sur une pénichette à fond plat et à la forme rectangulaire. En voilier, le moindre tourbillon d’eau fait pression sur la quille et la fait pivoter, la forme incurvée de la coque ne permettant pas non plus un appui très stable contre le mur de l’écluse. Gilets de sauvetage (ils n’ont jamais autant servi !) et amarrage sont obligatoires… et plus que souhaités ! Les
plaisanciers n’ont pas obligation de s’annoncer à la VHF mais les éclusiers l’apprécient (également un petit merci et au revoir après l’éclusage semble de coutume).
Pour changer, un coucher de soleil... dans les terres !
Mieux voir les péniches de commerce de loin que de près dans les écluses !
Bollène remporte le prix de la plus impressionnante des écluses de notre périple : elle mesure 195 m sur 12 m. Réalisée peu après la Seconde guerre mondiale, c'était alors la plus haute du monde avec sa dénivellation de 26 mètres.
Une écluse permet à un bateau de franchir un dénivelé. Elle se compose d'un sas, une chambre à eau où entrent un ou plusieurs bateaux, limité des 2 côtés par les bajoyers (murs) et, à l'avant et à l'arrière, par des portes. Une fois les bateaux entrés et amarrés dans le sas, les vannes sont ouvertes, si bien que le sas se vide (dans le bief en aval) et le bateau descend avec le niveau de l'eau, ou le sas se remplit (avec de l'eau du bief en amont) et le bateau monte. Quand le niveau d'eau dans le sas est égal à
celui du bief aval ou amont, la porte avant s’ouvre et les péniches peuvent sortir. Une passe à poissons a été aménagée sur un coté du barrage pour permettre à la faune du Rhône de passer le barrage dans les deux sens.